Partie 2: La ZLECA ou comment relancer les économies africaines au lendemain de la crise sanitaire du COVID-19
L’UA peut limiter les conséquences économiques de la pandémie grâce à la ZLECA
A situations exceptionnelles, mesures exceptionnelles ! Attendre que les mesures fiscales et tarifaires soient pensées et mises en application n’est plus une option. Il faut trancher au cas par cas, l’urgence économique sur le court-terme étant de limiter l’impact de la crise sur le tissu économique continental. Heureusement, une palette de solutions existe et mérite d’être explorée :
- Coordonner la riposte sanitaire : dans l’immédiat, il faut éradiquer le virus ! Sous l’égide de ses organes de gouvernance, le premier acte fort de la ZLECA devrait être de mettre à disposition de l’ensemble du système de santé continental et des populations les équipements nécessaires pour sauver des vies et pour se protéger : matériel de réanimation, appareils respiratoire, gants, masques, gels hydro-alcooliques, médicaments, etc. Tout cela, au profit d’une coopération étroite entre les parties prenantes que sont les instituts de recherche, les bailleurs de fonds et les industries pharmaceutiques du continent. C’est l’occasion pour le continent d’exprimer son indépendance vis-à-vis de ses partenaires étrangers en ce qui concerne les produits pharmaceutiques en s’appuyant sur les talents locaux et les institutions existantes.
Le point d’orgue serait, qu’au profit de cette collaboration continentale, la ZLECA soit le cadre du développement d’un traitement efficace contre le COVID-19. Les premiers essais cliniques réalisés sur le continent (Burkina Faso, Maroc, Madagascar, etc.) semblent concluants et pourraient aboutir au développement d’un traitement efficace. Si ce traitement était un vaccin ou un nouveau médicament, il pourrait être breveté pour le compte de l’Union Africaine (UA) et les recettes générées seraient entièrement réinvesties dans la recherche scientifique, notamment la création d’un centre de recherche continental.
- Inciter les importations locales de produits alimentaires : la faible consommation des produits locaux est due, d’une part à leur méconnaissance par le grand public, et d’autre part à la faible capacité de production des unités locales. Pour la ZLECA, c’est l’occasion de poser les bases pour promouvoir « consommons local». Pour le rendre effectif, il faut inciter les gouvernements à accorder des facilités douanières et tarifaires aux importateurs de produits alimentaires de base, qui s’approvisionnent auprès de producteurs africains. Il faut aussi booster les capacités locales de production afin d’accroître la quantité de biens mises à disposition du marché.
A terme, il pourrait en découler la conception d’une industrie locale, agroalimentaire, pharmaceutiques, textile, etc. Cette industrie, qui s’approvisionnerait auprès de producteurs locaux, pourrait déjà connaître une première phase de développement régional en attendant d’être élargie à l’ensemble de la zone.
- Doter la ZLECA d’un Fonds de Soutien et de Relance Économique : il faudra de la ressource financière pour répondre à l’urgence sanitaire et soutenir les entreprises et les secteurs d’activité les plus impactés par la crise. La première solution n’est pas forcement l’endettement ou le recours à l’aide financière étrangère. A raison de deux dollar US (environ 1.200 FCFA) par habitant, la ZLECA pourrait se retrouver avec un fond de démarrage d’environ 2,4 milliards USD. La dotation serait alors à la charge des pays, au prorata du nombre d’habitants.
La Banque Africaine de Développement (BAD) pourrait se voir confier la gestion autonome du fonds. Ce dernier étant destiné au soutien et à la promotion des secteurs prioritaires pour le développement économique de la Zone.
- Expérimenter l’interopérabilité bancaire au niveau des Communautés Économiques Régionales de l’Union : le faible taux de bancarisation en Afrique a toujours été déploré et à ce jour, des économies sont encore trop fortement dépendantes du cash. Les autorités bancaires et financières ont l’occasion de revoir la législation dans les différentes Communautés Économiques Régionales (CER) de l’Union afin de favoriser des solutions sans contact, bienvenues dans le cadre des gestes barrières contre le COVID-19. C’est d’ailleurs ce que la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et la Banque Des Etats d’Afrique Centrale (BEAC) ont annoncé à travers leurs mesures réglementaires visant à promouvoir les paiements électroniques.
A moyen ou long terme, l’objectif à atteindre sera d’intégrer davantage de personnes au système financier classique. La promotion des échanges pour les PME en sera aussi positivement impactée. Les États disposeront donc d’une base réglementaire suffisamment solide pour opérationnaliser la banque digitale et la banque pour tous au niveau de chaque Communauté Économique Régionale au sein de l’Union.
- Transformer le business model du secteur privé : cette crise est une opportunité pour les entreprises du secteur privé d’opérer des innovations et réorientations sur leurs modèles d’affaires et leurs modes de prestation et de distribution de services et produits.
Si cela se fait, on pourra enfin assister à un essor de la digitalisation dans la distribution de produits et de services.
La période est donc propice pour que les banques, par exemple, envisagent la digitalisation partielle ou totale de leurs prestations de services et distributions de produits. Dans le même temps, la grande distribution expérimentera davantage les concepts de commande en ligne, de la boutique virtuelle et des points de retrait. C’est toute l’économie qui est appelée à se révolutionner, tant dans la conception d’offres que dans leur distribution.